Etherre

Etherre – fanzine du désaménagement

 

Dédensifier, déréguler, désaménager.

Le désaménageur retire sans laisser de cicatrices. Cette action peut même paraître invisible. Le désaménageur promeut les espaces disponibles, les vides, les trous dans un territoire souvent surchargé de signes, de restes, de ruines. Le désaménageur tentera de recouvrir d’une couche de terre fertile les sites arrachés, griffées, raturés, par trop de palimpsestes.

L’architecte est légitime pour traiter d’espace, de territoire, de paysage. En imaginant une évolution du métier, l’architecte ne pourrait-il pas aussi devenir celui qui donne légitimité à ce qui n’est pas planifié ? Cette nouvelle définition apparaît à un moment de crise de la construction. A un moment où la construction est peut-être aujourd’hui devenue plus une affaire de spéculation foncière qu’une activité destinée à fabriquer des enveloppes (Sloterdijk). Contre la planification, le désaménageur défend les micro organisations, leur donne le poids d’un système et une légitimité face à l’institution. Le désaménageur, c’est enfin celui qui s’occupe des fantômes, de leur écrire une histoire, de les faire resurgir à travers une architecture fictionnelle.

Il ne s’agit cependant pas d’un mouvement de négation face à la construction. Il s’agit plutôt de proposer une autre façon de s’insérer dans un système, certes contraint, mais qui fonctionne à peu près. Peut-on envisager des réponses « miroirs », une sorte d’hétérotopie de l’architecture, en imaginant des phases de déconstruction ?

Constatant que les méthodes d’aménagements actuelles qui répondent aux demandes politiques sont souvent irréalisables, comment opérer autrement ?

Certaines questions posées dans/par les projets urbains ne semblent pas être à la hauteur des enjeux climatiques et sociétaux auxquels les sociétés mondialisées doivent faire face. L’évolution rapide tant des modes de vie que des géographies requièrent de nouvelles narrations.

Les protocoles de construction sont régis par des lois. La Loi Mop organise le processus par phases, de l’esquisse au PRO, puis les phases chantier. Le processus inverse de déconstruction est laissé libre aux entreprises, des démolisseurs qui décident d’eux-mêmes et pour eux-mêmes la façon de détruire et de récupérer les matériaux, voire également de récupérer les terres excavées pendant un chantier. Il n’existe pas, ou peu, de stratégie urbaine de la démolition, la déconstruction, de la fabrication des vides, et de récupération et fabrication de terres fertiles. Quand on sait qu’il faut parfois des années d’assistance auprès des habitants pour cicatriser la démolition d’un quartier, la question requiert réflexion, surtout lorsqu’il est possible de la traiter en amont. De même, la raréfaction des terres végétales devient une question urgente pour la survie des espèces, humains inclus. Mais ces missions n’existent pas, ou peu, dans le champs de l’architecture. L’architecte est celui qui bâti. Or, le manque d’espace disponible aujourd’hui et le ralentissement de la croissance peuvent renouveler le rôle et les fonctions d’un spécialiste de l’espace («l’espace» au sens large étant entendu à la fois comme aménagement, stratégie, et programmation), dans un environnement saturé où la demande des pouvoirs publics s’oriente de plus en plus vers une nécessité de fabriquer des respirations.

A travers la refonte des outils traditionnels d’aménagement (remise en question des unités de mesure, requalification des échelles, intégration de nouvelles sources et datas, appréhension de nouveaux cadres de réflexion, collaboration et pluridisciplinarité, développement de nouvelles méthodologies…), Etherre propose de nouvelles modalités d’exercice pour imaginer la vocation des territoires et paysages en ruines.

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